Pour une analyse anthropologique des phénomènes sécularisateurs du bukut chez les Diola Boulouf de Basse Casamance (Sénégal)

Abstract

: L’ouverture de la société diola aux autres groupes ethniques et son embrassement de la culture occidentale par le biais de la colonisation qui a pu implanter des écoles, des églises et de la religion musulmane avec la construction de mosquées, des écoles arabo-coraniques, a entraîné de transformations remarquables sur le rite initiatique (bukut) qui semble avoir atteint le seuil critique de sécularisation. De nos jours, l’organisation de bukut a largement dépassé le cadre du village pour atteindre celui de tous les villages (de bukut) et même du reste du monde. Du coup, les modalités concrètes de l’imposition de la gestion sexuelle par le bukut perdent progressivement leur crédibilité. Cette perte de crédibilité est liée, entre autres, à la pratique de la sexualité pendant le bukut, justifiée par la forte présence des femmes et des hommes étrangers. Ce qui fait que la prohibition des pratiques sexuelles qui est pourtant l’un des éléments sur lesquels reposent les principes fondamentaux de bukut est devenue une banalité. Les dépenses énormes ont souvent des effets néfastes aussi bien sur le plan économique que sur celui social. Le bukut est en voix de désacralisation ou, mieux encore, de folklorisation dans la mesure où les acteurs mettent beaucoup l’accent sur les festivités en réduisant surtout la durée de retraite dans le bois sacré. De plus en plus, le profane prend le dessus sur le sacré. La répression collective qui constitue l’aspect coercitif et qui garantit même l’existence du bukut semble avoir connu une baisse considérable. Les futurs initiés n’affichent pas de crainte vis-à-vis des lois de l’initiation. Ces comportements sont le résultat des systèmes éducatifs occidental et arabe mis à leur disposition, à travers l’islam et le christianisme (l’école). Tout cela témoigne de la dégénérescence de bukut qui est en cours de réalisation.