La riziculture dans la commune de Boutoupa Camaracounda : potentialités, contraintes et stratégies d'adaptation.
Abstract
Le mémoire porte sur la commune de Boutoupa Camaracounda, en Basse Casamance (Sénégal),
territoire à fort potentiel rizicole, mais confronté à des contraintes naturelles, climatiques et
socio-économiques majeures. Depuis les années 1970, la variabilité pluviométrique, la
salinisation des sols, le conflit casamançais et l’exode rural ont désarticulé les systèmes de
production. La crise sanitaire liée à la COVID-19 et la dépendance au riz importé ont accentué
la vulnérabilité alimentaire. L’objectif du travail est d’analyser les potentialités rizicoles
locales, d’identifier les freins à leur valorisation et d’évaluer les stratégies d’adaptation mises
en œuvre par les acteurs pour renforcer la résilience agricole. La méthodologie repose sur une
revue documentaire, des enquêtes de terrain auprès de 130 ménages répartis dans quatre
villages, des entretiens avec des personnes ressources, une analyse cartographique
diachronique (1991-2022) de l’occupation des sols et le traitement statistique des données
climatiques et d’enquête. Les résultats montrent que la commune dispose d’atouts notables :
sols favorables, réseau hydrographique dense, population active, savoirs agricoles endogènes.
Toutefois, elle subit des contraintes sévères : variabilité climatique, salinisation des rizières,
ravageurs, désorganisation paysanne, manque d’appui technique et de financement, impact du
conflit et de la pandémie. Face à ces défis multiformes, les populations locales ont mis en œuvre
des stratégies d’adaptation innovantes, parmi lesquelles la reprise de la riziculture dans
certaines rizières longtemps abandonnées. Cette dynamique a été rendue possible grâce à
l’apparition du nénuphar, localement appelé Coboyot, dont la présence constitue un indicateur
écologique précieux signalant une réduction progressive de la salinité des sols. D’autres
stratégies incluent l’usage de semences à cycle court, la diversification agricole (maraîchage,
anacarde, pastèque), la valorisation des sous-produits et des initiatives artisanales de lutte contre
les ravageurs. Malgré ces efforts, l’absence d’accompagnement institutionnel limite leur portée.
En définitive, la relance du secteur rizicole nécessite une réhabilitation du barrage de Guidel,
l’accès aux semences adaptées, l’organisation des producteurs en coopératives et la valorisation
des ressources locales. Le mémoire recommande également de mener une analyse comparative
entre les sols colonisés par le Coboyot (nénuphar) et ceux qui ne le sont pas, afin d’orienter les
politiques agricoles vers une souveraineté alimentaire durable.
