Dynamique de la mangrove et impacts dans le Département d’Oussouye (Basse Casamance) entre 1972 et 2014.
Abstract
Oussouye est l’une des zones qui disposent des plus belles formations de mangrove en Basse Casamance. Ces formations constituent un écosystème particulier de par ses fonctions, son importance et son lieu d’implantation. Hormis leur rôle de séquestration de carbone reconnu, les formations de mangrove abritent de nombreuses ressources fauniques et floristiques dont dépendent directement les populations riveraines. Elles sont aussi le siège des principales activités rurales menées dans le département d’Oussouye (riziculture, pêche, récolte d’huîtres, de coquillages et autres…). Ces formations forestières, jadis luxuriantes, ont amorcé, durant les années 1970 et 1980 une dégradation graduelle mais prononcée aujourd’hui. L’étude de la dynamique de la mangrove par télédétection a permis d’appréhender sa dégradation, entre 1972 et 1986, à 47,1 % et 90 % respectivement pour les faciès mangrove dense et mangrove moins dense. Cette période d’importante dégradation de la mangrove correspond aux années les plus dramatiques dans l’histoire de la pluviométrie au Sénégal, et particulièrement dans la zone d’Oussouye. La période 2000-2014 se particularise par la régénération de la mangrove puisqu’on remarque une évolution positive de 36,8% pour la mangrove dense et de 14% pour la mangrove moins dense. Cette reprise est à replacer dans le contexte du retour, quoique timide, de la pluviométrie aux conditions relativement meilleures et à la prise de conscience, par la population, de l’importance du rôle stratégique que joue la mangrove. Cette prise de conscience s’est traduite par d’importantes opérations de reboisement. Ces résultats montrent malgré tout que les taux de régression des surfaces de mangrove plus importants que ceux d’apparition.
Les facteurs à l’origine de cette dynamique régressive de la mangrove sont à la fois d’ordres naturels et anthropiques. Au plan naturel, on peut noter la forte variabilité climatique qui s’est traduite par un déficit pluviométrique surtout durant les années 1970 et 1980, par la diminution de la durée de la saison pluvieuse. Cette déficience pluviométrique a eu comme conséquences la salinisation des terres et leur acidification, la faiblesse de la régénération naturelle. L’étude a également montré que les activités anthropiques ont leur part de responsabilité dans la dégradation de la mangrove, notamment durant la période 1972-1986. Les actions anthropiques qui ont porté préjudice aux écosystèmes de mangrove concernent les pratiques et comportements non conformes à la philosophie de conservation durable des ressources naturelles. Cette dégradation des écosystèmes de mangrove a porté atteinte aux formations de mangrove et au devenir de la population locale. Les impacts environnementaux et socio-économiques révèlent la forte dépendance de la population vis-à-vis de leur environnement, surtout dans cette zone où la ruralité est extrêmement importante. En effet, les populations dépendent, pour leurs activités de subsistance, des ressources naturelles, particulièrement celles de mangrove (riziculture, pêche, cueillette, etc.) vue la configuration physico-géographique du département d’Oussouye. Conscientes des enjeux de développement durable et de l’importance de leur écosystème de mangrove, les populations ont entrepris, avec l’appui des partenaires au développement et des ONGs, des actions de réhabilitation des écosystèmes de mangrove dégradés. Il reste à mieux organiser et structurer ces actions avec l’appui de la recherche scientifique. Dès lors, face à l’ampleur des menaces qui pèsent sur la mangrove dans le Département d’Oussouye en particulier et en Casamance en général, les communautés locales et la recherche scientifique doivent travailler en synergie pour la production de connaissances fines sur cet écosystème en vue d’une gestion durable qui concilie politiques de conservation et développement au profit des générations futures.