dc.description.abstract | Objectif : L’objectif principal de notre étude était d’évaluer le vécu psychologique de l’infertilité des femmes suivies au service de gynécologie-obstétrique du centre hospitalier national Dalal Jamm (CHNDJ) de Dakar.
Méthodologie : Il s’agissait d’une étude prospective, transversale et descriptive au niveau du CHNDJ de Dakar chez les femmes en couple depuis au moins 1 an qui consultent pour désire de grossesse, mais aussi celles qui sont affectées et entièrement suivies pour infertilité du couple dans la période allant du 11 octobre 2021 au 17 octobre 2022. Les données étaient recueillies par interview direct sur une fiche contenant le questionnaire puis saisies sur l’application KOBO collecte. Le traitement et l’analyse des données était faits par les logiciels Excel et SPSS. Les critères d’inclusion étaient toutes femmes en couple depuis au moins un an et ayant consulté pour désir de grossesse ainsi que toute femme affectée et entièrement suivie au service pour infertilité du couple. Les variables étudiées étaient : les caractéristiques socio-démographiques, les antécédents gynéco-obstétricaux, la représentation psycho-sociale de l’enfant et de la maternité, le parcours de soin à la recherche de solution, les réactions psychoaffectives de la femme affectée par l’infertilité du couple, le retentissement de l’infertilité dans la vie du couple et au sein de la société, les mesures de résiliences adoptées par la femme affectée par l’infertilité du couple et les aspects de la prise en charge.
Résultats : Nous avions colligé 100 femmes qui répondaient aux critères recherchés. Le profil socio-démographique des femmes était celui d’une femme dont l’âge moyen était de 34 ans avec des extrêmes de 18 ans et 47 ans. La tranche d’âge de 30-37 ans était la plus représentative. Les patientes résidaient en majorité à Dakar. Le niveau d’étude secondaire était le plus représenté (31 %) suivi du niveau d’étude supérieure et primaire à des proportions égales de 28 %. La profession libérale représentait 37 % et les sans profession 31 %. L’ethnie wolof était prédominante (47 %). La majorité de nos patientes étaient de religion musulmane (95 %). Les femmes cohabitaient avec leur conjoint depuis plus de 5 ans dans 54 % des cas. 85 % de nos patientes étaient à leur premier mariage. L’infertilité primaire était plus représentée soit 61 %.
Le conjoint participait aux explorations pour la majorité (68,8 %). L’infertilité était d’origine féminine dans 51 % des cas, masculine (11 %), mixte (30 %) et inexpliquée dans 8 % des cas. Les consultations chez les tradipraticiens étaient rapportées par 47 femmes (47 %). Toujours dans la recherche de solution, 9 patientes avaient recours à l’Assistance médicale à la procréation (AMP) et 2 patientes étaient en train de faire des démarches pour adopter un enfant.
S’agissant de l’explication donnée à l’infertilité, elle n’est pas liée à un événement vécu selon la quasi-totalité de nos patientes (97 %). Elle serait plutôt due à la volonté divine (65 %) ; au maraboutage (4 %) ou à la possession par un démon maléfique (6 %). Dans l’entendement des patientes interrogées, l’enfant représente une bénédiction, ou celui qui va assurer la perpétuité de la famille (69 %), celui qui consolide le couple et confère une sécurité aux parents en leur assurant leur survie (59 %).
À l’annonce du diagnostic, les femmes avaient ressenti une situation de désespoir dans 29,6 % des cas, une situation de frustration dans 23,9 % des cas, un sentiment proche de celui de l’annonce d’un cancer ou de maladie grave dans 21,1 % des cas, voire d’un décès dans 14,1 % des cas. Concernant la conséquence sociale de l’infertilité, pour la majorité de nos patientes soit 54 %, l’infertilité n’avait pas de répercussion dans leur vie de couple. Le conjoint s’est plus rapproché de son épouse dans 37 % des cas. Cependant, nous avions noté des cas de retentissement négatif à type d’abandon par le conjoint (6 %), de manque d’attention (5 %), de diminution de la communication (8 %), une communication qui tourne autour du projet d’enfant (8 %), une diminution de la fréquence des rapports sexuels (2 %), qui sont programmés en fonction du jour de l’ovulation (1 %). Pour la plupart des cas, les relations avec la belle-famille étaient inchangées. Néanmoins, on a noté 17 % de cas de stigmatisation, 14 % de marginalisation et 23 % où la femme est mise sous pression. Ce type de relation avec la belle famille est proche de celui décrit dans l’entourage. L’infertilité avait un retentissement sur la vie professionnelle des femmes dans 22 % des cas. On a noté un manque de concentration pour la plupart des patientes (76 %). Nous avons noté des manifestations psychologiques chroniques à type d’anxiété (82 %), de dépression (73 %), d’insomnie (52 %), de troubles bipolaires (32 %), ou de honte permanente (22 %). Pour alléger leurs souffrances, des mécanismes d’autodéfense ont été adoptés par ces patientes à type d’isolement dans 62 % des cas, d’affiliation (20 %) et d’intellectualisation (13 %). Les relations avec le personnel étaient satisfaisantes pour la majorité des cas. Au moment de notre étude, aucune prise en charge psychologique n’a été faite chez nos patientes. Les types d’aide les plus exprimés par les patientes étaient d’ordre médical (68 %), aide financier (37 %), spirituel (23 %) et psychologique (20 %).
Conclusion : L’infertilité a des répercussions psycho-sociales néfastes chez les femmes. Une prise en charge psychologique et médicale (PMA) permettrait à ces femmes une meilleure insertion sociale, une diminution considérable des manifestations psychologiques et une augmentation des chances de survenue d’une grossesse. | en_US |